Autant par adhésion au mouvement que par intérêt documentaire, j’ai été présent lors de trois rassemblements des Gilets Jaunes à Paris. Si mes obligations professionnelles ne m’en avaient pas empêché, je me serais rendu à toutes les manifestations.
Extrait de mes notes relatives à la journée du 24 novembre 2018 (Acte II) :
« Lorsque la batterie de mon appareil me lâche, je me trouve en haut de l’Avenue de Friedland. Différentes fumées s’élancent dans le ciel et la police recule face à une foule de plus en plus déterminée. Quelques heures plus tard (à 19h), je me trouve Pont de l’Alma et je décide de prendre le métro pour regagner mon domicile. Entre temps, les Champs-Élysées et leurs alentours ont été amplement saccagés.
Si je devais retenir une image que je n’ai pas eu l’opportunité d’enregistrer, il s’agirait des Champs-Élysées à la tombée de la nuit. À ce moment là, j’étais situé sur l’avenue à hauteur de la rue Marbeuf. J’observais les lieux tels un corps en proie au supplice. Les barricades dressées le matin n’étaient plus que des tas de ferrailles et d’immondices enflammées. Des masses calcinées expulsaient les derniers souffles d’une fumée pathétique. Recouvert par l’eau s’échappant d’une borne à incendie, le pavé brillait lamentablement, la foule pataugeait, elle allait et venait au beau milieu de gravas en tous genres. Au loin, l’Arc de Triomphe était scandaleusement beau. Il vomissait un peuple de jaune vêtu, précédant des forces de l’ordre avançant désormais péniblement. Autour de moi, la colère légitime et l’excitation malsaine n’en finissaient pas de se consumer. »